Impôt sur la fortune immobilière : quel impact pour le pacte Dutreil ?

Par : edicom

Par Gérard Picovschi, avocat, cabinet Selas Avocats Picovschi

L’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) a été supprimé au profit de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Revenons sur l’impact de la suppression de l’ISF sur le pacte Dutreil.

Le pacte Dutreil était un dispositif applicable dans deux situations différentes : pour bénéficier d’une réduction de l’assiette taxable de l’ISF, « pacte Dutreil ISF », ou des droits de mutation, « pacte Dutreil transmission ». Aujourd’hui seule l’exonération des droits de mutation reste possible. Il pourrait être assoupli prochainement par la loi de finances pour 2019, en projet à l’heure actuelle. 

Disparition et conséquences du pacte Dutreil ISF

Le dispositif ISF permettait au contribuable redevable de l’ISF de bénéficier d’une exonération de 75 % de la valeur des parts de société à déclarer, dès lors qu’un certain nombre d’engagements était pris. En effet, pour bénéficier de cette exonération, l’associé devait prendre, selon l’ancien article 885 I bis du Code général des impôts (abrogé le 30 décembre 2017) des engagements de conservation des titres sociaux, afin de garantir la pérennité de l’entreprise.

Le Code général des impôts prévoyait ainsi trois conditions :

- la mise en place d’un engagement collectif de conservation pris par le propriétaire voulant bénéficier de l’exonération pour lui et ses ayants cause à titre gratuit avec d’autres associés. Cet engagement ne pourra être inférieur à deux ans. Cet engagement devait « porter sur au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s’ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou à défaut, sur au moins 34 % des parts ou actions de la société » ;

- le contribuable propriétaire des parts sociales devra conserver ses titres. L’exonération partielle lui sera acquise au terme d’un délai global de conservation de six ans. Celle-ci porte sur tous les titres soumis à l’engagement collectif. À noter que le non-respect de cette obligation pendant six ans pouvait entrainer la remise en cause des exonérations qui avaient été accordées ;

- l’un des associés de l’engagement collectif de conservation doit exercer une fonction de direction, et ce, pendant les cinq années qui suivent la date de conclusion de l’engagement. 

Le pacte Dutreil ISF a été assez naturellement abrogé au moment de la suppression de l’ISF. La question des engagements en cours reste toutefois d’actualité. Les bénéficiaires d’un pacte encore en cours sont-ils encore tenus de leurs obligations de conservation ?  La rupture de leurs engagements a été envisagée par plusieurs députés, qui avaient proposé des amendements pour clarifier la situation. Ils faisaient également valoir que la levée des engagements en cours aurait limité les contentieux éventuels relatifs au pacte Dutreil ISF abrogé. Ces amendements n’ont toutefois pas été retenus. Ainsi, il semblerait plus sage pour les contribuables bénéficiaires de pacte Dutreil ISF de respecter leurs engagements afin d’éviter la remise en cause des exonérations passées dont ils ont été bénéficiaires.

Le pacte Dutreil : un mécanisme encore avantageux pour la transmission d’entreprise

Le pacte Dutreil continue d’exister, mais seulement en ce qu’il permet de bénéficier d’avantages fiscaux lors de la transmission d’entreprise. En effet, selon l’article 787 B du CGI, le pacte Dutreil permet une exonération de l’assiette taxable des droits de mutation à titre gratuit lorsque plusieurs conditions sont respectées. Il faudrait ainsi que soit mis en place :

- un engagement collectif de conservation des titres sociaux. Le donateur devra s’engager à conserver un pourcentage de parts (« au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s’ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 %, y compris les parts ou actions transmises ») avec ses associés, pendant deux ans minimum ;

- d’un engagement individuel, pris par chaque héritier, légataire ou donataire, de conserver les parts ou les actions transmises pendant une durée minimale de quatre ans à compter de la fin de l’engagement collectif ;

- de l’exercice d’une fonction de direction par l’une des parties signataires, jusqu’à la fin de l’engagement collectif et pendant une période minimale de trois ans après la date de transmission (soit cinq ans).

Soulignons que le régime actuel du pacte Dutreil pourrait être légèrement aménagé par la loi de finances 2019, actuellement adoptée en première lecture par l’assemblée. En effet, l’article 16 du PLF pour 2019 procède à la modernisation et à un assouplissement du dispositif Dutreil-transmission.

Le pacte Dutreil reste ainsi un mécanisme assez attractif pour les chefs d’entreprise qui souhaitent transmettre leurs entreprises à leurs enfants, même si d’autres options de transmission peuvent parfois mieux convenir à votre situation (Family Buy Out, donation-cession, etc.).  Le recours à un professionnel du droit compétent en droit des sociétés et en droit fiscal pourra éclairer le contribuable sur les meilleures options qui s’offrent à lui. 

  • Mise à jour le : 29/11/2018

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