Réglementation : la surprotection des épargnants a des effets pervers

Par : edicom

Les petits clients pourraient bien être les sacrifiés de la réglementation hyper contraignante qui pèse sur les professionnels de la finance. L’éclairage de Sandrine Genet, directrice et fondatrice de Carat Capital.

Si l’exigence de transparence a du bon pour la protection des consommateurs, les professionnels de finance s’interrogent aujourd’hui sur les conséquences perverses du niveau inédit d’obligations qui leur incombe. Communication sur les marges, respect de l’environnement, obligation de s’assurer de la bonne adéquation des choix financiers avec leur situation et leur capacité à tolérer le risque… « On demande à la Finance ce que l'on n'accepterait pas dans un autre secteur, déplore Sandrine Genet, directrice et cofondatrice de Carat Capital. Qui accepterait, lorsqu'il commande une côte de bœuf à son boucher, que ce dernier lui demande avant de le servir, son âge, son poids, et ses dernières analyses sanguines. Cela pour le protéger et s'assurer que son alimentation est adaptée à sa santé ? »

Les récentes évolutions règlementaires contraignent les conseillers en gestion de patrimoine à s'investir fortement sur ces sujets de suivi, d'adéquation et d'informations auprès des clients. Au détriment du temps passé avec eux sur leur dossier, faute d’une équipe ou de moyens suffisants pour faire face à ces contraintes. L'accompagnement représente pourtant la principale attente des clients. En découlent deux conséquences : la concentration des cabinets de gestion de patrimoine qui doivent atteindre une taille critique pour faire face à ces contraintes règlementaires tout en maintenant un suivi de qualité ; et l'abandon des « petits clients » jugés peu rentables. « Si le suivi demandé est le même pour un client disposant de 30 000 euros ou de 2 millions d'euros d'épargne financière, les revenus générés par ces clients ne sont pas du tout les mêmes, observe Sandrine Genet. Beaucoup d'intervenants, banquiers ou conseillers, s'interrogent et décident de ne plus suivre ces clients ou de ne leur proposer qu'une offre simplifiée, afin de minimiser le coût pour leur structure. »

La surprotection des épargnants apporte donc une transparence bienvenue et un travail bien fait, mais elle risque aussi à défavoriser la grande majorité des clients qui n'auront plus accès à un large choix dans leurs placements financiers.

Carat Capital a fait le choix de se rapprocher à l'été 2019 du cabinet ASG Finance, afin d'étoffer ses équipes, de se doter de moyens suffisants pour répondre aux nouvelles contraintes et de continuer à travailler librement quel que soit le client. Mais le malaise est bien profond au sein des cabinets de gestion de patrimoine. 

  • Mise à jour le : 10/10/2019

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