Associer le droit, la réflexion médico-légale et l’habilité financière
En amont de toute organisation patrimoniale, l’indemnisation des victimes d’accident passe le plus souvent par une phase judiciaire durant laquelle l’expertise d’un avocat spécialisé dans le domaine reste incontournable. Marc-André Ceccaldi, avocat depuis vingt-sept ans (cabinet Preziosi-Ceccaldi-Albenois, basé à Marseille et Paris) revient sur les atouts d’un bon accompagnement des victimes dans les différentes étapes du processus d’indemnisation.
Profession CGP : Pourquoi avez-vous décidé de vous spécialiser dans le domaine ?
Marc-André Ceccaldi : J’exerce depuis vingt-sept ans ce beau métier de vocation et d’engagement.
Au fil des décennies, la profession a beaucoup évolué pour s’adapter à la complexification du droit et à la frénésie législative. Aujourd’hui, il n’est plus envisageable d’embrasser efficacement tous les branches du droit public et du droit privé car chacune requiert un degré élevé de formation, des compétences spécifiques et une importante expérience pratique.
En revanche, la spécialisation constitue un gage de compétence et de performance, notamment en droit du dommage corporel. C’est une discipline juridique exigeante qui traite des possibilités indemnitaires offertes aux victimes après un accident soudain.
Notre cabinet se consacre à la défense exclusive des victimes que l’impréparation aux épreuves de l’existence place en situation d’inégalité vis-à-vis des assureurs.
Au quotidien, la vie moderne nous expose à une multitude de risques d’atteintes corporelles qui se concrétisent sous des formes aussi brutales que variées. Un accident de la circulation, un accident domestique, un accident médical, un accident provoqué par un animal ou un produit alimentaire, des violences volontaires et un attentat terroriste figurent parmi les épreuves principales de notre champ de spécialisation.
Le besoin d’accompagnement des victimes se manifeste précocement puisque les leviers indemnitaires dépendent des circonstances initiales. A l’instar d’un premier rendez-vous médical avec le médecin, notre première rencontre avec la victime a donc pour objectif de dresser un diagnostic juridique des perspectives indemnitaires.
C’est-à-dire ?
Avant toute action, il convient de distinguer deux grandes catégories d’accidents. Il s’agit, d’une part, de ceux n’ouvrant pas un droit à réparation systématique. Dans cette première hypothèse, le fait dommageable est survenu sans l’intervention d’un tiers. L’indemnisation dépend du degré de prévoyance qui animait la victime ou sa famille au travers de souscription de garanties préalables. Les plus fréquentes sont les garanties accident de la vie ou les garanties du conducteur qui fixent les modalités de l’indemnisation (postes de préjudice indemnisables, niveau d’indemnisation, plafond de garantie). Malgré l’absence de réparation intégrale et la rigidité des règles préétablies, le bénéfice de ces garanties implique souvent le soutien d’un spécialiste indépendant des assureurs. Tirant profit de l’ambiguïté rédactionnelle des contrats, certains d’entre eux tentent d’imposer une interprétation restrictive des préjudices indemnisables et des exclusions. Un règlement amiable apparaît alors impossible du fait de la dénaturation du contrat. Dans cette confrontation inégalitaire entre un professionnel et un consommateur de droit, nous parvenons à convaincre les juges de rétablir une lecture favorable à l’assuré.
A titre d’exemple, deux jugements réunionnais récents caractérisent notre plus-value. Dans une première décision du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion du 30 janvier 2020, le juge nous a accordé une indemnisation de 485 903,76 €, alors que l’offre de l’assureur se limitait à 12 500 € ! La dimension extensive de l’expression contractuelle « et notamment » qui entourait la liste des préjudices a prévalu sur une dimension limitative.
Dans une seconde décision de Saint-Pierre de la Réunion du 3 mars 2023, la notion de tierce personne a été entendue comme un préjudice indemnisable à part entière, et non comme un remboursement subordonné à la production de facture. Nous avons obtenu une indemnisation de 107 714,75 €, dix fois supérieure à l’offre d’Areas CMA qui se situait à 9 500 €. Des écarts d’un à dix, voire d’un à quarante entre l’offre et le résultat illustrent l’importance de la spécialisation dans l’obtention d’une juste réparation. C’est encore plus vrai dans l’indemnisation de droit commun qui n’est pas plafonnée par un contrat.
La seconde catégorie d’accidents dessine une possibilité de réparation intégrale. Il s’agit des accidents provoqués par un tiers. L’assurance qui couvre le responsable ou un régleur désigné par la loi vont supporter la charge d’indemnisation, sans aucune autre limite que le niveau de préjudice supporté par la victime. Dans ces situations, le savoir-faire de notre cabinet s’exerce de manière optimale, notamment à l’égard des grands blessés pour lesquels il est hyperspécialisé.
Votre spécialisation dans le domaine suppose que vous ayez développé des compétences autres que juridiques…
Tout à fait, nous avons acquis une compétence transversale qui associe une maîtrise du droit, une aptitude à la réflexion médico-légale et une habilité financière. Cette triple expertise permet de freiner efficacement les ardeurs de contrôle des assureurs sur l’élaboration de leur dette indemnitaire. Par ailleurs, elle apporte une plus-value dans toutes les étapes du processus indemnitaires.
Dans la conquête du droit à réparation, la faute de la victime peut exclure ou diminuer son indemnisation. La spécialisation permet de mesurer la pertinence des griefs opposés par l’assureur et de les contredire car ils revêtent un caractère abusif. Nous parvenons fréquemment à faire reconnaître tout ou partie d’un droit qui était entièrement refusé.
Certaines victoires ont même une portée plus générale. Par un arrêt de la Cour de cassation du 6 mai 2021, nous avons fait reconnaître à notre client accidenté en fauteuil roulant électrique la qualité de victime protégée, alors que cette catégorie de victimes était jusqu’à présent considérée comme conducteur de véhicule terrestre à moteur. Cette décision constitue une avancée jurisprudentielle qui va profiter à toutes les personnes dans sa situation.
Notre hyperspécialisation permet également de contrôler le rythme du processus indemnitaire par le déclenchement d’actions précoces. Nous parvenons à débloquer des provisions importantes dans la période où les préjudices définitifs ne sont pas encore quantifiables. Débloquer ce type d’avances facilite la réadaptation des victimes. Une provision conséquente débloquée au moment propice permet, par exemple, de financer un aménagement du logement, l’acquisition d’aides techniques onéreuses ou l’embauche d’auxiliaires de vie.
Notre participation active à toutes les expertises médicales, intermédiaires et finale, permet d’obtenir une juste évaluation des différents préjudices et, plus particulièrement, du besoin en aide humaine qui est un poste important pour les victimes en situation de handicap.
Au stade de la consolidation, nous refusons que l’indemnisation finale se limite au financement d’une simple survie. Nous combattons pour la meilleure indemnisation possible, car c’est du montant obtenu que dépend la capacité de la victime à trouver un nouvel équilibre de vie, des activités et une participation sociale.
Cette conception ambitieuse de la réparation se concrétise chaque jour par des résultats indemnitaires qui peuvent représenter jusqu’au triple du montant envisagé par l’assureur. Des niveaux exceptionnels sont également obtenus pour les victimes les plus sévèrement touchés. Notre cabinet détient ainsi deux records indemnitaires de près de 15 millions d’euros, obtenus respectivement au profit d’une jeune adolescente accidentée en situation de tétraplégie et d’une jeune femme en état pauci-relationnel à la suite d’une anoxie néonatale.
Ces indemnisations ne sont pas des fins en soi, mais des moyens de pérenniser la réinsertion des victimes en apportant sécurité et capacité de financement des besoins aux plus gravement touchés. Dès lors, la gestion du capital indemnitaire relève d’autres spécialités professionnelles qui doivent garantir une gestion patrimoniale équilibrée entre sécurité, liquidité et protection sociale.
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