Location et cession d’un bien immobilier par un résident américain

Par : edicom

Par Christophe Goudal, gérant du cabinet CG Finance

Céder ou louer un bien immobilier situé en France nécessite de bien appréhender la convention fiscale entre la France et les Etats-Unis, mais aussi de se plonger dans le droit local. Explications avec le cas de Monsieur Dupont.

Monsieur Dupont, de nationalité française, réside en Californie depuis trente ans. Il est détenteur de la carte verte. Il entend prendre sa retraite à horizon deux ou trois ans et envisage un retour en France. En qualité de résident de longue durée, M. Dupont pourrait donc être soumis à l’Exit Tax s’il renonçait à la carte verte lors de son retour en France.

Il vient d’acquérir un appartement en France qu’il destine à devenir sa résidence principale à terme. Dans l’attente, il a souhaité mettre ce bien à la location. Il vient de signer un bail d’habitation non meublée. M. Dupont souhaite connaître la fiscalité applicable à ces revenus immobiliers.

Par ailleurs, il possède un terrain en France qu’il entend vendre pour se constituer un capital, lequel lui apportera des revenus complémentaires lors de son départ à la retraite. Il a reçu ce terrain par donation en 1991 (27 ans). Le terrain est aujourd’hui valorisé à 550 000 €.

M. Dupont s’interroge sur les impacts liés à cette vente au regard de son statut de résident américain.

Fiscalité liée à la vente du bien immobilier situé en France

En France

L’article 13, paragraphe 1, de la convention fiscale entre la France et les Etats-Unis prévoit que les gains provenant de la vente de biens immobiliers sont imposables dans l’Etat où sont situés ces biens. Toutefois, il ne s’agit pas d’une imposition exclusive. L’Etat de résidence peut également imposer ces produits.

En effet, la plus-value réalisée par un résident américain à l’occasion de la cession d’un immeuble situé en France, supportera une retenue à la source en France. Cette plus-value sera également imposable aux Etats-Unis mais l’impôt payé en France viendra s’imputer sur le montant de l’impôt américain. Les prélèvements sociaux payés en France n’ouvrent pas droit à un crédit d’impôt aux Etats-Unis. Bien entendu, dans la mesure où la plus-value immobilière est exonérée en France, elle ne pourra pas ouvrir droit à un crédit d’impôt aux Etats-Unis.

Ce terrain ayant été reçu par donation il y a vingt-sept ans, M. Dupont sera exonéré d’impôt sur le revenu (abattement de 100 % au-delà de la 22e année).

En ce qui concerne les prélèvements sociaux, les abattements pour durée de détention ne sont pas les mêmes que pour l’impôt sur le revenu. Après la cinquième année de détention, l’abattement applicable sur la plus-value réalisée est de 1,65 % par an jusqu’à la 21e année. Il est de 1,6 % la 22e année, puis de 9 % pour chaque année au-delà de la 22e année. L’exonération totale des prélèvements sociaux n’est donc acquise qu’au-delà d’un délai de détention de trente ans.

M. Dupont détient le terrain depuis vingt-sept ans. Aussi, il devrait bénéficier d’une exonération totale (impôt sur le revenu et prélèvements sociaux) dans la mesure où il le vend dans trois ans.

Aux Etats-Unis

Nous avons vu précédemment que les Etats-Unis (pays de résidence de M. Dupont) peuvent également imposer les plus-values sur cessions d’immeubles en France en éliminant ensuite la double imposition éventuelle par l’octroi d’un crédit d’impôt.

Au vu du délai de détention, la plus-value réalisée par M. Dupont sur la vente du terrain serait exonérée en France au titre de l’impôt sur le revenu. Aussi, il ne bénéficiera pas de crédit d’impôt à faire valoir sur l’impôt dû aux Etats-Unis. L’administration américaine ne considère pas les contributions sociales (CGS, CRDS) comme des impôts couverts par la convention fiscale. Elle refuse donc à ce jour de les prendre en compte pour la détermination du montant du crédit d’impôt. Par conséquent, si M. Dupont vend son terrain avant les trente années de détention, les sommes dont il s’acquittera au titre des prélèvements sociaux ne pourront pas faire l’objet d’un crédit d’impôt.

Exonérée d’impôt sur le revenu en France, la plus-value réalisée sera imposable aux Etats-Unis aux différents échelons : fédéral et local. M. Dupont a reçu le terrain par donation. L’administration fiscale américaine ne retient pas le prix du bien réévalué dans le cadre de la donation mais se base sur le prix d’acquisition initial pour calculer la plus-value (prix auquel le terrain a été acheté par le donateur).

Au niveau fédéral

Pour un bien détenu depuis plus d’un an, les taux d’imposition varient de 15 à 23,8 %. Pour savoir quel taux sera appliqué, l’administration fiscale américaine tient compte de l’intégralité des revenus et plus-values perçus au cours de l’année. Dans la mesure où ces derniers sont supérieurs à 450 000 $ [soit près de 390 000 € au 29 mai, ndlr], le taux applicable est de 23,8 %.

Au niveau local (Etat de Californie)

Le taux varie entre 6 et 12 %. Il sera également tenu compte de l’intégralité des revenus et plus-values perçus au cours de l’année pour définir le taux applicable. L’impôt fédéral sera déduit de l’impôt local dans la limite de 10 000 $ [soit près de 8 700 € au 29 mai, ndlr].

Fiscalité liée à la perception de revenus fonciers en France

Aux termes de l’article 6, paragraphe 1, de la convention fiscale entre la France et les Etats-Unis, les revenus des biens immobiliers sont imposables dans l’Etat où ces biens sont situés. Toutefois, l’Etat de résidence peut également imposer ces revenus.

En France

M. Dupont doit déclarer en France les loyers perçus de la location de son appartement. L’impôt payé en France constituera un crédit d’impôt déductible de l’impôt américain.

Le bien est loué nu. Aussi, deux régimes sont susceptibles de s’appliquer en fonction du montant du loyer perçu :

- régime du microfoncier : ce régime s’applique de plein droit, lorsque le montant annuel des revenus bruts fonciers perçu n’excède pas 15 000 €. Le revenu net foncier imposable bénéficie alors d’un abattement forfaitaire de 30 % ;

- régime réel : ce régime s’applique lorsque le montant des loyers bruts excède 15 000 € par an. Avec des loyers inférieurs à 15 000 € par an, Il est également possible d’opter pour le régime réel (option irrévocable durant trois ans). Cette option peut être intéressante lorsque les charges déductibles (taxe foncière, prime d’assurance, travaux d’entretien, etc.) sont supérieures à l’abattement forfaitaire de 30 %.

L'impôt sur le revenu des non-résidents est établi sur leurs revenus de source française avec application du barème progressif de l'impôt sur le revenu et du système du quotient familial. L'impôt résultant de ce calcul ne peut être inférieur à un taux de 20 % d'imposition. Cependant, si le contribuable peut justifier que le taux de l'impôt français sur l’ensemble de ses revenus mondiaux serait inférieur à 20 %, c'est ce taux inférieur qui sera appliqué à ses revenus de source française (art. 197 A du CGI). En sus, les revenus fonciers nets seront soumis aux prélèvements sociaux au taux de 17,2 %.

Aux Etats-Unis

Les loyers issus de la location en France seront imposés aux Etats-Unis comme si le bien était situé sur le territoire américain. Toutefois, au regard de la convention fiscale franco-américaine, M. Dupont bénéficiera d’un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt acquitté en France. Les sommes versées au titre des prélèvements sociaux en France ne feront pas l’objet d’un crédit d’impôt puisque l’administration fiscale américaine ne reconnaît pas les contributions sociales comme des impôts.

Les dépenses d’entretien et de réparation seront déductibles du revenu locatif dans l’année où elles ont été engagées. A contrario, les travaux d’amélioration et de construction seront immobilisés et ajoutés au prix de revient de l’immeuble. Ce prix de revient sert à une dotation aux amortissements laquelle est déductible du revenu. L’amortissement s’effectue sur une durée de quarante ans. Cette « charge virtuelle » permettra de diminuer sensiblement la base imposable.

Les amortissements pratiqués seront réintégrés lors de la vente du bien immobilier pour calculer la plus-value.

 

  • Mise à jour le : 18/06/2018

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