Bercy précipite l'encadrement de la rémunération des intermédiaires en Pinel

Par : edicom

David Charlet, président de l'Anacofi et de la Fecif, revient sur l'actualité réglementaire qui touche la profession et les ajustements obtenus grâce à l'action menée conjointement par les associations représentatives, déplorant par la même occasion la démarche isolée de la CNCGP dans le cadre du sommet BFM Patrimoine.

Profession CGP : L’ordonnance de transposition de la DDA a été publiée. Etes-vous satisfait du texte final ?

David Charlet : Nous sommes plutôt satisfaits. Il n’y a pas de mauvaise surprise dans ce texte, même s’il est à noter qu’il ne suffit pas à comprendre pleinement comment fonctionnera concrètement la distribution d’assurance d’ici six mois.

La crainte de voir imposer un conseil personnalisé dans tous les cas est écartée, et la formation annuelle des professionnels est possible également par les entreprises du courtage, ce que le premier projet ne prévoyait pas. Notre action, menée avec les autres organisations du courtage d’ANCIA, a porté ses fruits.

Quels sont les derniers ajustements attendus ?

D. C. : Il en reste un certain nombre. Nous travaillons avec les autres associations et syndicats du monde de l’assurance à valider les thématiques des formations annuelles, qui devraient faire l’objet d’un arrêté.

Nous avons encore à régler le cas de l’IPID, document de présentation des contrats non-vie, dont le format concret n’est pas si clairement stabilisé. La définition française du « produit » d’assurance, pour lequel il faudra, entre autres, définir un marché cible, fait encore l’objet de discussions. Il en va de même de la frontière entre les actions d’intermédiation qui relèveront du nouveau devoir de conseil écrit et de la recommandation personnalisée.

Autant de sujets qui sont actuellement traités dans le cadre de travaux à l’ACPR, auxquels nous participons. Si nous nous fions à l’agenda qui nous a été proposé, les réunions de concertation se termineront en juillet, après quoi l’ACPR prendra position. 

La rémunération est également en ligne de mire dans le cadre des opérations immobilières. Où en est-on des discussions relatives à leur encadrement ?

D. C. : Le sénateur de Montgolfier a introduit un amendement en vue d’encadrer la rémunération des intermédiaires en Pinel. Il avait déjà obtenu le plafonnement des acteurs de la défiscalisation via des fonds de type FCP et FIP. En réalité, l'idée était plus de mettre en place un plafonnement des seuls frais des intermédiaires non promoteurs, que de parler d’un encadrement, ce qui se traduirait par un taux fixe, quel que soit le travail réalisé.

Après des échanges avec les ministères et les autres organisations professionnelles concernés, mais également des promoteurs et des consommateurs, nous avions obtenu d’une part un report de la rédaction du décret et d’autre part, la mise en chantier d’une grande étude indépendante sur le marché du neuf et du Pinel. Ses conclusions auraient dû servir à réfléchir intelligemment sur les mesures à prendre (encadrement des frais ou autre). Globalement, cette étude est une très bonne surprise et nous avons apparemment moins de difficultés que prévu pour rassembler des données.

Cependant, Bercy nous a prévenus cette semaine qu’il était question de sortir le décret en urgence, d’ici quelques jours. Donc à l’heure où j’écris ces lignes, nous sommes en pleine négociation d’urgence et toutes les hypothèses sont possibles.  

N’aurait-il pas été nécessaire de s’entendre sur la notion d’intermédiation, comme cela est aujourd’hui le cas dans le secteur bancaire et assurantiel ?

D. C. : Oui et non. Disons qu’il y a une différence entre intermédiation et distribution, et qu’il y a aussi une différence entre des missions que peuvent aussi bien remplir les intermédiaires que les producteurs/promoteurs et la seule phase de vente.

Ce qui s’est avéré idiot avec la logique de taux fixe plafonné pour les intermédiaires, c’est justement que c’eut été sans nuance et sans considération d’aucunes des réalités de quelque écosystème que ce soit !

Cependant, peut-on suivre l’exemple de l’assurance ? C’est une bonne question. DDA n’est pas un texte sur les intermédiaires, mais sur la distribution, quel qu’en soit le canal. C’est moins vrai en finance et en bancaire, même si aujourd’hui toutes ces sphères disposent d’une réglementation lourde pour tous les acteurs et toutes les actions menées.

En clair, l’immobilier ne nécessite pas de nouvelle définition, surtout si on se rappelle que la définition de l’intermédiation y est très couvrante et par bien des égards, très proche de celle que nous connaissons en banque/finance/assurance. Ce n’est donc pas un problème de définition à mon avis. 

Quel est, selon vous, la meilleure manière de promouvoir la profession des CGP ?

D. C. : La bonne manière est celle que nous, les quatre associations, mettons en œuvre ces dernières années.

Evidemment, l’action des plus grosses associations se voit plus, mais quand je discute avec les présidents de la Compagnie des CGPI ou de la CNCIF, je comprends que, comme nous, ils assurent une présence terrain et tâchent de fournir les services que leurs membres souhaitent. Peut-être n’ont-ils pas déployé les 300 jours de formation et événements partout en France que nous arrivons à délivrer, mais ils assurent la vie et la représentation de leurs membres qui ont « choisi » d’être dans ces associations et pas dans une autre.

Nos actions et le travail de nos membres font que le CGP inconnu et invisible date d’un autre temps. Seuls des gens qui veulent faire peur, ou ne savent absolument pas ce qu’est la réalité, peuvent encore jouer sur cette corde.

La réalité d’aujourd’hui, ce sont des organisations de CGP connectées partout, y compris à l’Assemblée nationale et aux ministères, présentes dans toutes les instances consultatives ou décisionnelles, à Paris et à Bruxelles ; une distribution de l‘assurance-vie non collective par le courtage, quasiment vampirisée par nos membres ; 10% de l’immobilier intermédié en France…

Et même si certains tentent de le faire oublier, j’assure la présidence de la Fédération européenne de nos métiers au sens large, ce qui ne représente pas rien et permet/oblige à de nombreux échanges.

Par ailleurs, on ne compte plus les inflexions de textes obtenues et même la loi Pacte, projet accompagné par plusieurs associations professionnelles, dont trois de CGP.

Ces actions démontrent que nous sommes parfaitement capables de collaborer quand il le faut. Cette idée de collaboration est dans les gènes de l’Anacofi. Je rappelle que nous n’avons jamais attaqué qui que ce soit qui n’avait ouvert le feu, mais aussi et surtout, que s’il existe une douzaine d’associations dans notre écosystème, nous avons passé des accords fermes avec huit d’entre elles et nos grands événements en région se font systématiquement en invitant certaines. Je pourrais encore rappeler que quatre autres structures sont aujourd’hui membres de notre confédération. Ces unions et le poids que cela nous confère sont un atout qui a changé beaucoup de choses.

Il restait à être mieux vu des médias grand public. C’est fait. Chacun a pu voir nos passages et nos campagnes sur différents supports de communication, dont la télévision. La campagne papier/internet/radio/télé de notre convention annuelle a touché, d’après les analyses de nos annonceurs, près de 1,5 million de Français et encore, je reste mesuré car d’autres chiffres m’ont été présentés. Comme vous avez pu le constater, nous ne sommes pas les seuls à accéder à ce type de médias. Cependant il faut garder la tête froide et ne pas nuire à la cohésion. Comme les autres présidents d’associations, je déplore que ce ne soit pas le cas de nos confrères de la CNCGP.

Vous faites référence au nouveau sommet BFM Patrimoine en partenariat avec la CNCGP…

D. C. : Il n’est pas possible de s’associer avec un média pour créer un salon sans les autres et, quand on ne représente pas 30 % de la profession, revendiquer clairement que cet évènement « fédérateur » est créé au nom de l’ensemble de la profession, en démarchant les membres et partenaires des autres associations et en monétisant les interviews proposées à « nos » membres… C’est comme si nous financions notre Convention ou nos LCE en province en appelant des membres de la CNCGP à payer. C’est tout bonnement surréaliste.

La critique dans vos pages, à peine voilée, des événements historiques du métier, quand une société qui en organise, s’occupe aussi de leur Convention, tout en se permettant de créer un événement commercial concurrent des leurs est aussi très surprenante.

Que dire du fait que ce rendez-vous des CGP soit placé à six jours de notre historique grand débat Anacofi de fin d‘année, qui en est un aussi ? Outre que nous ne serions pas moins légitimes à revendiquer agir pour l’ensemble des CGP, ça n’est clairement pas amical et cela va faire se télescoper nos actions. La moindre des choses aurait été de se parler.

Nous avons, en outre, tous noté l’invitation généralisée à nos membres, sans concertation avec nous, en pleine période de réadhésion. La réaction immédiate de la CNCIF, puis celle de la Compagnie des CGPI montrent bien à quel point le mode opératoire est choquant aux yeux de tous.

Je pense que tout le monde dans notre milieu comprendra bien qu’il s’agit pour nous d’un casus belli, sans provocation préalable de notre part.

C’est très exactement l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire et bien entendu nous ne soutenons d’aucune manière cet événement commercial, promu par une organisation maintenant de taille moyenne (bien qu’elle ne représente qu’entre 25 et 27 % de la profession) et clairement démasquée comme seule agressive.

En collaboration avec les deux autres associations, nous continuerons donc à creuser notre sillon et à déployer nos campagnes et actions, au nom des trois CGP sur quatre que nous représentons.

J’espère que personne ne se méprendra sur les campagnes de communication, y compris télé, qui entoureront notre Grand Débat et d’autres événements. Elles étaient prévues de longue date, et n’auront d’autre objectif que de diffuser l’image de nos métiers et de faire connaitre nos actions.

Je forme le vœu que certains reviennent à plus de raison et que nous puissions faire avancer les choses ensemble. A défaut, je crois pouvoir dire que la taille et l’union feront front et revendiqueront assurer pleinement la représentativité des CGP/CGPI.

  • Mise à jour le : 05/06/2018

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