Jean-Marc Peter (Sofidy) : « Les fonds visés par la BCE ne sont pas les SCPI »

Par : Benoît Descamps

Le directeur général de Sofidy nous explique pourquoi les SCPI devraient traverser agilement cette crise. 

 

Profession CGP : Il y a peu, une publication de la BCE a alerté sur les risques pesant sur les fonds immobiliers. Faut-il craindre une crise de liquidité sur le marché des SCPI ?

Jean-Marc Peter : La BCE a mis en effet  le feu aux poudres. Or, cela ne concerne qu’un type de fonds immobiliers anglo-saxons dont la liquidité est prétendue totale alors que leur actif n’est constitué que de biens immobiliers. Ces fonds offrent une possibilité d’entrée ou de sortie quotidienne ou hebdomadaire à leur valeur liquidative, sans coût de frottement ; alors qu’ils sont constitués d’actifs dont la cession prend plusieurs mois. Ces aspects ont attiré de nombreux investisseurs, avec à la clé de belles collectes. Nous avons d’ailleurs quelques exemples récents de fonds – chez KKR et BlackStone – dont la liquidité n’a pas été au rendez-vous. Les fonds visés par la BCE ne sont donc pas nos SCPI. 

 

Pourquoi les SCPI ne seraient-elles pas vulnérables ?

Plusieurs raisons concourent à considérer que les SCPI ne devraient pas souffrir d’une crise de liquidité dans le contexte actuel. Les associés des SCPI investissent dans une logique totalement différente de celle des investisseurs dans ces fonds anglo-saxons. Leur motivation d’achat est à long terme pour atteindre des objectifs tels que la constitution de revenus complémentaires en vue de leur retraite, la construction de leur patrimoine, en faire un outil pour transmettre leur patrimoine… L’investisseur français reste également convaincu que l’immobilier est une valeur refuge. La hausse des taux qui pénalise toutes les classes d’actifs n’est pas de nature à remettre en cause ses projets patrimoniaux de long terme.

Parallèlement, les caractéristiques des SCPI sont assez protectrices. Elles sont également peu endettées ; les plus agressives l’étant à hauteur de 20 % maximum. Autre aspect, les SCPI ont des coûts de frottement entre l’entrée et la sortie. Une commission de souscription de 10 % s’applique lorsque l’associé sort : cela freine les ardeurs. Pour celles qui ne prélèvent aucune commission de souscription, des pénalités de sortie s’appliquent, généralement sur lors des quatre premières années. Notons également que les expertises annuelles des patrimoines sont généralement assez conservatrices, contrairement aux fonds anglo-saxons. Le mode de gestion d’une SCPI est donc bien éloigné de celui des fonds anglo-saxons.

Enfin, le contexte actuel n’a rien à voir avec la crise que la pierre papier a connu durant les années 1990. Il s’agissait alors d’une crise de l’offre : trop de bureaux avaient été construits, alors que le marché des SCPI était très étroit, voire confidentiel. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, les SCPI ayant su traverser différentes crises avec sérénité.

 

La hausse des taux a-t-elle impacté votre collecte ?

Le premier trimestre a été très actif. Chez Sofidy, nous considérons la période actuelle comme porteuse pour les associés de nos SCPI. Grâce à nos 800 millions d’euros de liquidités à déployer, cela nous permet de saisir des opportunités, alors que ces dernières années les prix augmentaient et les rentabilités baissaient. Cette capacité à nous positionner rapidement sur des opérations nous offre la capacité d’injecter du sang neuf dans nos portefeuilles. Nous avons procédé à quelques acquisitions récemment notamment dans le quartier des affaires à Londres avec un rendement net de 6,5 % et un bail de six ans ; mais aussi à Paris sur des actifs de bureaux et de commerce avec des rentabilités nettement supérieures à 5 %.

Comme toujours, il s’agit de biens à l’emplacement de qualité, ce qui permet d’avoir une forme de Pricing Power vis-à-vis des locataires et de pouvoir faire passer les indexations de loyer.

  • Mise à jour le : 15/05/2023

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