Une aide aux allocations d’actifs et à la sélection de fonds
Créée par des ingénieurs et physiciens, Quantalys s’est progressivement affirmée comme une des références dans les domaines des bases de données et des outils d’allocation d’actifs. La société compte encore développer son offre pour répondre au mieux aux attentes de leurs partenaires conseils en gestion de patrimoine.
Rien ne prédestinait les associés de Quantalys à travailler dans l’univers des fonds d’investissement. Initialement, ces ingénieurs et physiciens créent, en 1994, Cortosys une société spécialisée dans les effets spéciaux (avec notamment des réalisations pour Le Pianiste de Roman Polanski) et les jeux vidéo. « Vincent Weil avait travaillé sur les premiers logiciels d’image de synthèse pour une application militaire, indique Jean-Paul Raymond, associé et directeur du développement de Quantalys qui a intégré la société en 1997. A cette époque, nous sommes au tout début des applications civiles de ses concepts et on assiste à la naissance d’Internet. Nous sommes alors l’une des premières sociétés à concevoir des sites Web en France, avec de belles références comme Danone, DHL ou encore le Club Med. »
Premiers pas en Italie
Tout bascule lors de la rencontre, en 1999, d’un groupe milanais de chercheurs en finance qui avaient notamment travaillé avec William F. Sharpe. Jean-Paul Raymond expose : « Ils avaient développé des modèles mathématiques d’optimisation de sélection d’OPCVM et souhaitaient en faire un logiciel. Un calcul prenait 36 heures ! Cela s’est matérialisé par apport mutuel de savoir-faire. Ces chercheurs nous ont fait bénéficier de leurs contacts. Nous avons alors travaillé avec Unicredit, Monte Paschi, ING Italia… En 2005, alors que nous travaillions depuis Paris, environ 5 000 conseillers italiens utilisaient notre outil ! »
Mais rapidement, la société voit le vent tourner de l’autre côté des Alpes et souhaite élargir son nombre de clients. Une nouvelle rencontre vient changer la donne.
Celle de Jean Pfau, un suisse physicien de formation devenu Business Angel. « Il avait alors 75 ans et avait fait sa carrière dans les machines outil de précision, raconte Jean-Paul Raymond. Nous lui avons parlé de notre modèle mathématique. Il décide alors d’investir dans le fonds retenu par nos modèles, en l’occurrence Sextant PEA alors totalement inconnu. Bingo ! Il gagne 30 % en quelques mois et décide d’investir dans notre entreprise. Auparavant, il avait fait fortune en rencontrant deux jeunes dont le business initial était de mettre quotidiennement sur CD-Rom les cours de Bourse des sociétés cotées en Suisse et de les distribuer ensuite. Cette société, dénommée Swissquote et dont il était le président, est ensuite devenue un site Internet de cotation, puis d’informations boursières avant d’être une banque en ligne. Le Boursorama suisse en quelque sorte. Aujourd’hui décédé, Jean Pfau avait un vrai goût pour l’investissement dans les projets entrepreneuriaux. Il a, par exemple, également rémunéré deux doctorants américains pour qu’ils parcourent pendant un an tous les campus universitaires. L’objectif était que chacun lui présente dix projets afin d’investir dans deux d’entre eux. Un concernait le développement de microprocesseurs organiques. »
Maîtriser sa base de données
Visionnaire, Jean Pfau impose alors trois conditions à son investissement à ses associés de Quantalys :
- passer du logiciel à une utilisation par Internet exclusivement : « On repartait de zéro au niveau de la programmation, se souvient Jean-Paul Raymond. En passant sur le Web, nous avions alors la contrainte d’afficher des résultats en un temps infime, alors qu’il s’agissait de calculs lourds. Pour cela, nous avons travaillé durant six mois avec des chercheurs de l’ENSAE, ce qui nous a permis de diviser nos temps de calcul par 500 » ;
- adresser le marché français, ce qui s’est matérialisé par le recrutement de Philippe Maupas, ancien directeur général de Morningstar France ;
- être Data Provider, c’est-à-dire maître de sa base de données : « Nous estimions alors que cela n’avait pas de valeur… », se souvient Jean-Paul Raymond.
« Ses conditions ont été structurantes pour la création de Quantalys. Il a été un vrai visionnaire », reconnaît-il. La base de données est alors constituée avec ses catégories et sous-catégories, la notation des fonds, les fiches pour chaque produit et surtout le branchement du système d’information avec ceux de chaque société de gestion. « Pour cela, le réseau de Philippe Maupas a été d’une aide précieuse, souligne Jean-Paul Raymond. Et il a fallu nous adapter aux différents formats des sociétés de gestion car nous ne pouvions imposer le nôtre à l’époque, puis mettre en place un système de contrôle des données. C’est toujours le cas aujourd’hui, avec 370 scripts qui tournent toutes les nuits et une équipe de sept personnes dédiée à cette tâche. Un boulot monstre ! »
Un premier contrat intégré au système – celui de la plate-forme Sélection R (désormais Sélection 1818) – fait alors basculer le rapport de force avec les sociétés de gestion. Aujourd’hui, Quantalys récupère quotidiennement les données de 100 000 produits (fonds, SCPI, FCPR, titres vifs…), avec des accords signés avec plus de 650 sociétés de gestion. En France, les données sur 35 000 fonds sont publiées sur le site et plus de 25 000 en Italie. Actuellement, cette base génère 15 % du chiffre d’affaires de la société, et contribue à la notoriété de la société. « Elle n’est pas rentable, mais elle nous permet d’avoir des relais dans la presse et d’avoir un site Internet fréquenté, note Jean-Paul Raymond. C’est aussi grâce à elle que nous apportons nos analyses et conseils sur les fonds. Elle nourrit nos modèles, permet de dénicher des fonds. »
Le site Internet affiche aux alentours des 60 000 visiteurs uniques chaque mois, pour 600 000 pages vues.
Un algorithme qui privilégie l’alpha
Avec l’accroissement de la réglementation, Quantalys a conçu et adapté ses outils aux besoins des professionnels. La société propose donc trois solutions. Le premier est un questionnaire permettant de déterminer selon les informations communiquées par le client, le niveau de risque toléré selon ses projets. Ensuite, la société propose un outil de construction d’allocation d’actifs efficiente.
Enfin, suite à la détermination du profil de risque et l’allocation d’actifs qui en découle, un troisième permet de sélectionner le meilleur mixte de fonds dans un univers d’investissement prédéfini comme un contrat d’assurance-vie. L’utilisateur peut totalement paramétrer son allocation. Par exemple, la volatilité cible est ajustable pour l’ensemble du portefeuille, mais aussi sur chaque classe d’actifs avec des barrières minimales et maximales. Et les calculs se font en temps réel.
Au fil des années, l’algorithme central a été affiné, mais il reste fondamentalement le même depuis dix-sept ans. « Il a prouvé sa robustesse, note Jean-Paul Raymond. Un portefeuille modèle existe depuis le 1er janvier 2009. Mis à jour tous les deux mois, il peut être répliqué au sein d’un contrat d’assurance-vie ou d’un compte-titres. Avec ce portefeuille, nous prouvons qu’il n’existe pas de débat entre la gestion active et la gestion passive : une bonne sélection de fonds permet de générer de l’alpha, y compris sur le long terme. »
« Nous sommes à l’antithèse de tous les robo-advisors basés sur des ETFs actuellement en vogue, poursuit Jean-Paul Raymond. Il s’agit de mettre en place une allocation d’actifs stratégique, puis d’aller chercher l’alpha généré par les gérants. Nos allocations se veulent très diversifiées, avec au moins huit à dix classes d’actifs différentes en portefeuille pour une bonne décorrélation et afin de parvenir au meilleur couple rendement-risque attendu possible. Mais notre savoir-faire principal consiste à trouver la meilleure combinaison de fonds pour répliquer cette allocation, c’est-à-dire trouver ceux ayant individuellement la meilleure qualité de gestion tout en interagissant le mieux ensemble quand ils sont associés. A l’inverse, les modèles des FintTechs reposent sur une vision passive des produits ce qui implique qu’ils doivent trouver leur surperformance à travers des choix tactiques sur les marchés ce qui est beaucoup plus difficile à mettre en place. Si cela était facilement modélisable, il n’y aurait pas autant d’économistes, de comité de gestion… dans les sociétés de gestion. Pour ces robo-advisors, le track-record sera le juge de paix de la qualité de leurs modèles, et nous verrons bien s’ils tiennent leurs promesses dans le temps. Mais notre conviction est que la carte gagnante sera celle du mixte entre le robot et l’humain : les métiers liés à l’argent nécessitent de la confiance. Il conviendra aussi de faire entrer les générations futures dans un processus d’investissement de long terme. »
D’importantes évolutions en perspectives
Quantalys travaille depuis plusieurs mois sur une nouvelle version, qui devrait être disponible au cours du premier semestre 2017. « Cette nouvelle version, qui sera totalement responsive, a été pensée pour obtenir une plus grande fluidité de l’outil. Nous avons travaillé pour la première fois avec des spécialistes en ergonomie et en expérience utilisateur, précise Jean-Paul Raymond. Nous espérons ainsi nous affranchir du principal défaut qui nous revient de nos utilisateurs à savoir la trop grande complexité d’utilisation de l’outil. Nous pensons que cette perception n’est due en réalité qu’à la multiplication des menus du fait de la complétude de l’outil et qu’une nouvelle interface mieux pensée devrait atténuer cette impression sans ne rien perdre des fonctionnalités existantes. Nous travaillons aussi, via un partenariat avec Budget Insight, à un service d’agrégation de comptes ainsi qu’à un Web client. »
Si le modèle se base sur une allocation stratégique dépendant de la durée d’investissement et du profil du client, Quantalys développe aussi un algorithme d’allocation tactique qui sera disponible cette année. « L’utilisateur pourra se positionner sur les marchés de manière tactique et à court terme, expose Jean-Paul Raymond. Sur chaque classe d’actifs en portefeuille, il aura la possibilité d’exprimer ses vues : haussier, neutre ou baissier, tout en indiquant un niveau de confiance à chacune de ses prévisions. L’algorithme central intègre ses éléments et ajuste l’allocation sans pour autant déformer les niveaux de risque définis initialement. » Avec ceci, le CGP peut ainsi prouver le suivi qu’il opère sur les portefeuilles de ses clients.
Une notoriété affirmée
Au fur et à mesure de ses développements, la société a acquis une notoriété certaine sur le marché. Ces dernières années, elle a particulièrement accéléré sa croissance. L’année 2016 a permis à la société de franchir un cap, avec une augmentation de son chiffre d’affaires de plus de 50 % et le recrutement de nouveaux collaborateurs, tous ingénieurs, certains étant même titulaires du CFA. « Si dans notre développement, nous avons bien été aidés par la réglementation, nous avons conservé notre ligne de conduite : concevoir des outils scientifiquement robustes tout en restant proches des besoins métiers, le tout associé à une base de données et à des services sur mesure à la demande. Ces dernières années, nous sommes passés au stade d’acteur sérieux à celui d’acteur reconnu », se félicite Jean-Paul Raymond.
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