Le mariage d’un montant de 1,9 milliard annoncé en grandes pompes en juillet dernier n’aura pas lieu. Un « retard dans la transmission de la documentation et des éléments chiffrés relatifs » est en cause selon Altarea. « Toutes les conditions étaient réunies » se défend Primonial.

Coup de théâtre ! Voilà que l’union des deux géants annoncée début juillet 2021 tombe à l’eau. Par l’acquisition de Primonial et d’une prise de participation minoritaire de l’ordre de 15% dans la Financière de l’échiquier (les 85% du capital restants étant conservés par les actionnaires actuels), Altarea comptait devenir « le leader indépendant de l’investissement et du développement immobilier ». Plus concrètement, les deux protagonistes visaient un leadership rendu alors incontestable dans le domaine de l’épargne, de l’investissement et du développement immobilier au sein d’un groupe d’une envergure sans équivalent en Europe, capable d’intervenir en tant qu’investisseur et développeur sur l’ensemble de la chaîne de valeur immobilière, sur toutes les classes d’actifs, avec une puissante capacité de distribution et de conseil patrimonial en architecture ouverte. L’accord initial prévoyait l’acquisition de 60 % du capital de Primonial au premier trimestre 2022 et 40 % début 2024, pour 1,9 milliard d’euros de valeur d’entreprise. L’échéance du premier closing d’un montant de 760 millions d’euros tombait donc le mardi 2 mars, le solde d’1,14 milliard d’euros en mars 2024.

Altarea renonce

Et c’est le lundi 28 février que l’état-major de Primonial a été prévenu « de façon unilatérale » que finalement tout tombait à l’eau. C’est dans un communiqué bref, mais incisif, que le groupe fondé et présidé par Alain Taravella l’annonce aux acteurs du marché en expliquant que « Dans le cadre de la revue de la documentation juridique dont certains éléments n’ont été communiqués que le 25 février, Altarea a constaté que les conditions convenues pour l’acquisition du groupe Primonial début mars n’étaient pas remplies du fait du non-respect – tant sur le fond, la forme et les délais – des stipulations du protocole d’acquisition signé en juillet 2021. »

Si le groupe tempère – un peu – ces propos « en déplorant cette situation qui ne permet pas de réaliser l’acquisition conformément au protocole d’acquisition et avec un niveau de sécurité juridique suffisant », il prévient toutefois qu’Altarea « mettra tout en œuvre pour faire valoir ses droits, protéger ses intérêts et ceux de ses actionnaires ».

Primonial ne compte pas en rester là

Même si le groupe présidé par Stéphane Vidal « prend acte de la décision d’Altarea de renoncer à son acquisition », Primonial se défend : « Les raisons invoquées sont essentiellement un “retard dans la transmission de la documentation et des éléments chiffrés relatifs aux opérations préalables au closing”. Cette opération très complexe, notamment dans une optique de simplification au closing de la structure actionnariale actuelle du groupe Primonial, a nécessité la réalisation d’un nombre très important d’opérations (fusions, augmentation de capital, réduction de capital…) dans des délais très contraints communément fixés en juillet dernier au moment du Signing. Il est inimaginable de remettre en question sa réalisation à seulement deux jours du closing pour cette seule raison, alors que toutes les conditions étaient réunies. »

Primonial a de quoi être surpris « de cette décision unilatérale du groupe Altarea » puisque l’annonce des résultats 2021 d’Altarea en fin de semaine dernière confirmait d’ailleurs l’acquisition du groupe Primonial dans les jours à venir : « Les équipes internes et cabinets de conseils/avocats des deux parties ont travaillé main dans la main depuis de nombreuses semaines avec une véritable volonté d’aboutir. […] Nous allons faire constater la défaillance de l’acheteur à ses obligations par toutes les voies de droit. »

« Nous restons convaincus que ce projet avait beaucoup de sens et qu’il était grandement porteur de synergies pour nos deux groupes sur le long terme, déclare Stéphane Vidal. Le groupe Primonial n’a jamais été aussi fort, soudé et précurseur, enregistrant des résultats financiers historiques. Notre organisation, nos équipes, notre capacité d’innovation et cette grande réactivité font du groupe Primonial cette entreprise si attachante et performante. Nous sommes fiers de ce que nous avons réalisé et défendons plus que jamais les valeurs fortes qui ont fait notre histoire et qui la feront encore longtemps. C’est le rôle du management du groupe de garantir cela. »

Et Stéphane Vidal d’ajouter que « les actionnaires, le management et les équipes du groupe sont plus que jamais investis dans l’écriture de la magnifique histoire de Primonial. Le développement organique est certain, les projets de développement sont nombreux et notre ambition intacte. »

De leur côté, les actionnaires de Primonial n’ont pas tardé à réagir : «  Cette décision subite et unilatérale de la société Altarea, qui cause un grave préjudice aux actionnaires de Primonial, est intervenue à quelques jours seulement de la réalisation de la cession prévue le 2 mars, alors même que l’ensemble des conditions de réalisation de l’opération étaient réunies. Cette décision étant en violation des accords conclus par les parties, les actionnaires de Primonial ont décidé de prendre toutes mesures nécessaires pour faire valoir leurs droits. »

Un mariage avorté et un divorce qui s’annonce… compliqué.